Profondes modifications sur le fichage génétique – DALLOZ

— Bon bah nous y voilà. Le décret pour raccourcir les durées de conservation arrive très bientôt. Outre ce décret, l’amendement supprime la notion de « ligne directe » concernant la recherche via la parentalité. Donc en gros : tu file ton adn, on pourra remonter toute ta famille lors d’une recherche d’une trace, alors qu’avant c’était juste tes parents…

La deuxième notion supprimé c’est l’ADN non codant. Donc en gros : quand tu file ton adn, la personne qui consulte ta fiche FNAEG (fichier ADN) pourra savoir ton origine ethnique ou si t’es malade.

wouai l’amendement est passé.

Sans débat, la commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté vendredi 9 novembre un amendement sur le fichage génétique (FNAEG). Outre une modification des règles d’effacement, il élargit les possibilités de recherches en parentalité et supprime la notion d’ADN non codant, verrou d’un fichage génétique selon les caractéristiques des personnes.

par Pierre Januel le 12 novembre 2018

La notion d’ADN non codant, supprimée par l’amendement du rapporteur Didier Paris, était centrale à la création du fichier, il y a vingt ans. Face aux risques de fuite de données et d’atteintes aux libertés, il s’agissait de ne pas intégrer de segments d’ADN comprenant d’information biologique sur la personne (maladies, origine ethnique). L’évolution de la génétique a remis en cause cette notion d’ADN inutile. Toutefois, la suppression pure et simple de ce mot modifiera en profondeur la destinée du FNAEG, en permettant d’inclure dans le fichier des éléments d’ADN relatifs à l’apparence ou l’origine des personnes.

Cette suppression permettra une « adaptation textuelle aux évolutions des nouvelles technologies ». Ce domaine évolue rapidement, la recherche en fonction de portraits robots génétiques (v. Dalloz actualité, 16 juill. 2014, art. C. Fonteix ) ou l’association de profils ADN à des signalements de personnes (deux projets de règlement européen évoquent cette possibilité) étant déjà possibles.

Par ailleurs, les possibilités de recherches en parentalité (faire correspondre une trace ADN avec celle d’un parent présent dans le FNAEG), actuellement limitées aux parents en ligne directe, sont élargies (v. Dalloz actualité, 17 juill. 2018, art. S. Fucini ). Ce qui étendra fortement le champ des personnes fichées indirectement au FNAEG.

Suite à une condamnation de la France par la CEDH (v. Dalloz actualité, 27 juin 2017, art. M.- C. de Montecler ), l’amendement modifie les règles d’effacement du FNAEG. Si le procureur refuse d’effacer les empreintes du fichier, la personne pourra dorénavant contester cette décision directement devant le président de la chambre de l’instruction. Par ailleurs, une personne condamnée pourra demander l’effacement de ses données, à l’issue toutefois d’un délai fixé par décret. Comme annoncé par le rapport sur les fichiers (v. Dalloz actualité, 19 oct. 2018, art. P. Januel ), l’article R59-3 du CPP pourrait être prochainement modifié, afin de raccourcir les durées de conservation pour les infractions mineures.

L’amendement prévoit enfin que le refus de prélèvement ADN par un condamné n’entraîne le retrait, de plein droit, que des crédits de réduction de peine liés à sa condamnation, et non de tous ses crédits.

https://www.dalloz-actualite.fr/flash/profondes-modifications-sur-fichage-genetique#.W-n84HpKjVo

ASSEMBLÉE NATIONALE
6 novembre 2018

LOI DE PROGRAMMATION 2019-2022 ET DE RÉFORME POUR LA JUSTICE – (N° 1349)

ADOPTÉ

AMENDEMENT N°CL846

présenté par

M. Paris, rapporteur

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ARTICLE 50

Avant l’alinéa 1, insérer les neuf alinéas suivants :

« I A. – Les deuxième et dernière phrases du deuxième alinéa et l’avant-dernier alinéa de l’article 706‑54 du code de procédure pénale sont supprimés.

« I B. – Après le même article 706‑54, il est inséré un article 706‑54‑1 ainsi rédigé :

« Art. 706‑54‑1. – Les empreintes génétiques des personnes mentionnées au premier alinéa de l’article 706‑54 peuvent être effacées sur instruction du procureur de la République, agissant à la demande de l’intéressé. À peine d’irrecevabilité, la personne ne peut former sa demande d’effacement qu’à l’issue d’un délai fixé par le décret prévu au dernier alinéa de l’article 706‑54.

« Les empreintes génétiques des personnes mentionnées au deuxième alinéa de l’article 706‑54 sont effacées sur instruction du procureur de la République agissant soit d’office, soit à la demande de l’intéressé.

« L’effacement des empreintes est prononcé lorsque leur conservation n’apparaît plus nécessaire compte tenu de la finalité du fichier. Lorsqu’il est saisi par l’intéressé, le procureur de la République informe celui-ci de la suite qui a été réservée à sa demande ; s’il n’a pas ordonné l’effacement, cette personne peut exercer un recours devant le président de la chambre de l’instruction.

« I C. – Après le mot : « retrait », la fin du III de l’article 706‑56 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : « des crédits de réductions de peine dont cette personne a pu bénéficier au titre de la condamnation prononcée pour ces infractions et de celle en vertu de laquelle le prélèvement doit être effectué. »

« I D. – L’article 706‑56‑1‑1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

« 1° Au premier alinéa, les mots : « en ligne directe » sont supprimés ;

« 2° Au second alinéa, les mots : « non codants » sont supprimés. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Le présent amendement complète l’article 50 du projet de loi relatif à l’exécution des peines en modifiant, sur trois points, les dispositions sur le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), afin notamment de mettre notre droit en conformité avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, en particulier de son arrêt Aycaguer contre France du 22 juin 2017.

Il est la traduction de l’une des propositions de la mission d’information sur les fichiers mis à la disposition des forces de sécurité conduite par votre rapporteur et M. Pierre Morel-À-L’Huissier.

En premier lieu, il simplifie et améliore le dispositif d’effacement anticipé des données inscrites au FNAEG :

– il prévoit que les refus d’effacement du procureur pourront être directement contestés devant le président de la chambre de l’instruction, sans intervention du juge des libertés et de la détention. Le mécanisme sera ainsi similaire à ce qui est prévu pour le TAJ ;

– il crée une garantie nouvelle pour les personnes déclarées coupables en leur permettant, comme c’est déjà le cas pour les personnes suspectes, et comme l’impose la décision précitée, de solliciter l’effacement anticipé de leurs données : à peine d’irrecevabilité, la personne ne pourra former sa demande d’effacement qu’après un délai fixé par décret, puisque la durée maximale de conservation des données est elle-même prévue par décret.

En deuxième lieu, il prévoit que le refus par une personne condamnée de se soumettre au prélèvement entraîne de plein droit le retrait des seuls crédits de réduction de peine liés aux faits qui lui sont reprochés, à savoir ceux dont elle bénéficie au titre de la condamnation pour cette infraction et de celle fondant le prélèvement, à l’exclusion des autres réductions de peine.

En troisième lieu, il permet que les recherches en parentalité ne soient pas limitées aux parents en ligne directe, ce qui renforcera l’efficacité du FNAEG.

En dernier lieu, il supprime la référence à la notion d’ADN codant, qui est devenue obsolète et peut représenter pour l’avenir un véritable handicap d’adaptation textuelle aux évolutions des nouvelles technologies.

http://www.assemblee-nationale.fr/15/amendements/1349/CION_LOIS/CL846.asp

Fichiers de police partout – DALLOZ

— Rapport de l’assemblée nationale sur les divers fichiers de la police et de sécurité… Il fait 100 pages, on va essayer d’analyser ça et sortir les « bonnes » infos… Mais à la lecture de l’article, ça à l’air bien flippant !

 

Une mission d’information des députés Didier Paris (LREM) et Pierre Morel-À-L’Huissier (UDI) s’est penchée sur la centaine de fichiers mis à la disposition des forces de sécurité. Avec les interconnexions et la reconnaissance faciale, les prochaines années devraient marquer une nouvelle étape.

par Pierre Januel le 19 octobre 2018

Des fichiers plus nombreux

En 2011, le second rapport Batho-Bénisti notait que sur 80 fichiers de police, 45 % étaient dépourvus de base juridique. Sept ans après, ce problème est réglé. La CNIL a diligenté depuis 2015, 29 contrôles sur les fichiers de police qui n’ont abouti qu’à deux mises en demeure et aucune sanction.

Toutefois, il y a une forte augmentation du nombre de fichiers. La mission d’information a compté 106 fichiers mis à disposition des forces de sécurité(seule la préfecture de police de Paris a refusé de transmettre ses informations) et 17 fichiers de sécurité. Mais cette augmentation se fait « sans réflexion sur la cohérence de l’architecture globale », avec un cloisonnement des fichiers. Ils « sont trop nombreux et forment un ensemble trop complexe », avec par exemple des durées de conservation et des conditions d’effacement très différentes.

Vers une interconnexion du FNAEG, FAED ou TAJ

La mission revient sur trois fichiers principaux :

  • le traitement d’antécédents judiciaires (TAJ), alimenté par la police et la gendarmerie pour leurs enquêtes, regroupe 18,9 millions de fiches de personnes mises en cause ;
  • le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) contient 6,2 millions de personnes ;
  • le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) centralise 2,9 millions de profils génétiques.

Le TAJ est notamment consulté dans le cadre d’enquêtes administratives se rapprochant ainsi du rôle du casier judiciaire. Mais il contient de nombreuses informations inexactes, notamment parce que les suites judiciaires des affaires y sont rarement inscrites. Avec des conséquences parfois lourdes pour les personnes, qui ne découvrent cette inscription qu’au moment du refus d’un emploi. Le RGPD prévoit l’information des personnes concernées au moment de leur inscription dans le TAJ, mais le Ministère de l’Intérieur envisage de limiter cette information à une publication sur son site internet. Les rapporteurs souhaitent un véritable droit à l’information.

Afin de fiabiliser les données du TAJ, les députés envisagent de rapprocher les trois fichiers. Depuis octobre 2017, l’outil GASPARD NG permet d’alimenter simultanément le TAJ et le FAED. Les rapporteurs veulent aller plus loin et envisagent une base centrale commune reliant FAED, FNAEG et TAJ. Mais cela « conduirait à une base de données particulièrement sensibles issues de différents traitements de données à caractère personnel poursuivant des finalités distinctes ». À défaut, un identifiant commun pour les trois fichiers pourrait être mis en place. Le sujet est en réflexion à l’Intérieur.

Plusieurs personnes auditionnées ont suggéré de créer une interconnexion avec le fichier des titres électroniques sécurisés (TES ; Dalloz actualité, 7 nov. 2016, obs. D. Poupeau ), qui contient les empreintes digitales et la photographie des demandeurs de cartes d’identité et de passeports. Les rapporteurs y sont opposés. Outre des difficultés techniques, une telle interconnexion se heurterait à la jurisprudence constitutionnelle. Par ailleurs, le traitement TES « présente une extrême sensibilité politique. On ne saurait le faire évoluer sans dommages vers un registre de la population ».

L’avenir : interconnexions et reconnaissance faciale

Les droits d’accès direct des différents services à des fichiers d’autres services ont été étendus au fil des années (v. Dalloz actualité, 15 sept. 2014, art. A. Portmann  ; ibid. 9 juill. 2018, art. P. Januel ). Les rapporteurs proposent d’aller plus loin mais également de développer les interconnexions pour aller contre le cloisonnement des fichiers.

Une mise en relation entre le TAJ et CASSIOPEE du ministère de la Justice est déjà expérimentée. Les rapporteurs envisagent une interconnexion entre le TAJ et le casier judiciaire national, pour permettre l’inscription dans le TAJ des condamnations pénales.

Les rapporteurs jugent aussi concevable un croisement, très encadré, entre le FSPRT (fichier de renseignement sur la radicalisation) et le Répertoire des expertises (REDEX) ou le fichier HOPSY qui permet le suivi des personnes hospitalisées sans leur consentement en raison de troubles mentaux.

Pour aller plus loin, le rapport envisage une interface permettant l’interrogation simultanée de différents fichiers, qui fonctionnerait comme un moteur de recherche à partir de la saisie d’une identité. Déjà, pour les enquêtes administratives, deux services compétents utilisent ACCReD qui permet le criblage d’une personne par la consultation simultanée de plusieurs fichiers (v. Dalloz actualité, 19 sept. 2017, obs. W. Azoulay ).

Outre l’interconnexion au niveau européen, un autre pas serait la reconnaissance faciale. Le TAJ comporte déjà une fonctionnalité de reconnaissance faciale permettant des rapprochements avec les 7 millions de photographies inscrites dans ce fichier. Selon le ministère de l’Intérieur, « la photo faciale est une biométrie qui présente moins de contraintes dans sa capture et son traitement que l’empreinte digitale ». Il est techniquement envisageable de permettre prochainement une consultation du FPR (fichier des personnes recherchées) à partir d’une photo.

Par ailleurs, le tableau de bord numérique des forces de l’ordre contient un appareil photo qui « offre des perspectives intéressantes peu explorées et prometteuses » pour le contrôle mobile des empreintes digitales : d’ici deux ans, NEO pourrait être un outil « de contrôle et d’identification des personnes recherchées, ou des étrangers en situation irrégulière, et de contrôle aux frontières ».

Des évolutions législatives sont à prévoir, et la loi d’orientation sur la justice qui arrive à l’Assemblée le mois prochain pourrait être une première occasion.

https://www.dalloz-actualite.fr/flash/fichiers-de-police-partout#.W-n7BnpKjVp